Ezio { Dirty little secret

Ça n’aurait jamais dû arriver. C’était une erreur, une grosse erreur, qui aurait pu être évitée facilement. Il aurait simplement suffit de trouver une valeur plus sûre pour s’échanger des informations, ça faisait des mois que tu en parlais déjà. Tu les avais prévenus, et personne ne t’avait écouté. Et maintenant, c’était à toi de réparer les pots cassés, comme d’habitude. Si seulement cette putain de factrice avait gardé ses doigts dans ses poches… Si seulement. Tu avais bien mieux à faire de venir lui faire les gros yeux, lui donner quelques coups et arracher quelques ongles. Tu renonçais à un rendez-vous avec une jolie libraire, pour venir ici. Tu avais des dossiers à travailler. Ce même dossier qui t’amenais ici, d’ailleurs.
C’est ton père qui t’avais mis sur le coup, personnellement. Ce qui annonçait l’importance du dossier, vraiment. Tu avais été rapidement briefé par ses conseillers, en avait profité pour leur rappeler que tu les avais prévenus que cela arriverait il y a de ça quelques mois, puis t’étais renseigné sur la fauteuse de troubles. Maria Guzzo. Factrice, jeunette, naïve et innocente. Tu t’étais renseigné sur sa vie, jusqu’à la  connaître sur le bout des doigts. Ses meilleurs amis, ses plats préférés, son emploi du temps... Tu as pris quelques jours de congés pour t’occuper de cette affaire, ne sachant pas vraiment ce que tu allais faire une fois face à elle. Ton père t’a demandé d’éliminer la menace. Tu l’as déjà fait, et le refera probablement encore, mais là, le cœur n’y est pas. La jeune fille a elle-même cherché les foudres de la famille, c’est sûr, mais tu ne sais pas. Une voix dans ta tête te dit que tu n’as même pas à y réfléchir, que tu dois suivre les ordres aveuglément, comme tu l’as toujours fait. Elle a peut-être raison.
Alors tu as mis un homme sur le coup. Il la suit, de loin, sans se faire remarquer, et te fait part du moindre de ses gestes. C’est plus simple pour toi, moins contraignant. Les hommes de main sont le futur, tu penses souvent. Alors quand tu apprends qu’elle est à la cathédrale, tu le mets sur le coup. Plus un badaud n’est supposé rentrer, et elle, elle ne peut pas sortir. Le prêtre, quant à lui, te connait bien, et saura parfaitement qu’il vaut mieux pour lui qu’il ne te dérange pas dans ta mission. Un sac sur l’épaule, tu fais signe à ton homme de surveiller l’entrée pendant que tu es à l’intérieur. La dernière chose que tu veux là, maintenant, c’est avoir des flics sur le dos. Tu sais très bien que la cathédrale est surveillée, bien surveillée même, alors pour plus de sureté, tu as un autre homme qui t’attends derrière le bâtiment, au volant d’une voiture. Tu ne penses pas que tu auras besoin de ses services, cependant. Cette affaire devrait être expédiée assez rapidement, comme toutes les autres. Rapidement, et avec efficacité. C’est ton motto.
Tu n’examines même pas les lieux en entrant, ils te sont déjà bien assez familiers. Tu sais où se trouvent les sorties les plus rapides, les plus secrètes, mais aussi où te cacher si jamais la situation dérape de manière dramatique. Alors lentement, tu t’avances, et remarque rapidement la brune. Seule, comme prévu. Tu ne fais pas en sorte d’être discret, tu veux qu’elle te remarque. Alors elle tourne la tête vers toi, alors tu t’avances. Elle pâlit, et tu vois la peur dans ses yeux. Toi aussi à sa place, tu aurais peur. Un homme habillé de noir, un sac de sport sur l’épaule, un visage dur barbu et des yeux froids comme la glace. Oui, elle a raison d’avoir peur. Tu t’arrêtes à quelques mètres d’elle, et pose ta main dans le bas de ton dos, sur ton flingue. Tu ne comptes pas l’utiliser, vraiment, cette solution de facilité, mais tu as pris l’habitude depuis ton adolescence de ne plus sortir sans. Ça te paraîtrait indécent, comme sortir nu. Ta tête se penche, doucement, tu l’observes. Le silence, la tension entre vous deux, est palpable. Finalement, ta voix roque retentit dans cette atmosphère glacée. « Maria, Maria, Maria… » tu dis en soupirant. « Qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire de toi ? » Question rhétorique, bien sûr. Tu sais parfaitement ce que tu vas faire d’elle – et tous tes accessoires se trouvent dans ton sac.